Brèves de lecture

Otto Dix, Lettres et dessins

Les lettres de 1921 à 1967 tracent un itinéraire. L’artiste y livre son quotidien, la famille, les amis, et la recherche des ressources, les rapports tantôt séducteurs et tantôt grognons avec les collectionneurs et les marchands, les conditions matérielles pas toujours faciles de son travail, mais aucune réflexion un peu construite sur sa pratique. « Je n’ai jamais formulé par écrit de déclaration, puisque mes tableaux sont, comme leur examen extérieur vous l’enseignera, eux-mêmes des déclarations des plus sincères, d’une sincérité que vous trouverez rarement de nos jours. Je ne suis pas non plus disposé ni en mesure de parler de sujets esthétiques ou philosophiques, et tout le reste ne serait que bavardage vain et subjectif. (…) Que celui qui a des yeux pour voir, voie ! » écrit-il dans une lettre de 1947. Cette attitude lucidement naïve répond bien à la peinture d’Otto Dix, « expressionnisme grotesque » a-t-on dit: il s’agit d’abord de toucher la sensibilité du spectateur par la sincérité et la violence de l’exprimé plastique. Si l’expressionnisme de Dix ne bouleverse pas la peinture (il s’inscrit dans une tradition, on a pu voir sa peinture dans la lignée du Gréco, de Munch, de Van Gogh…) sa forte personnalité profondément marquée par la première guerre mondiale donne à son oeuvre une présence singulière, et une étrangeté suffisante, bien qu’il n’ait pas l’engagement radical de George Grosz, pour qu’il soit un temps considéré comme « dégénéré » par les nazis. La dureté des images de ces peintres, la violence du trait particulièrement forte dans le noir des dessins et gravures, ont sans doute influencé les tendances expressionnistes que nous avons connues dans le dernier quart du vingtième siècle qui, elles, pourraient nous paraître un peu précaires et superficielles, un peu dérisoires à côté de la force féroce de certains de leurs aînés.

Catherine Teissier livre donc une documentation sans grande révélation, mais utile, rapidement située, qui informe autant sur le contexte social et culturel que sur le travail de l’artiste.

par M.A.

Otto Dix

Lettres et dessins

Traduits et présentés par Catherine Teissier

Sulliver éditions.