Brèves de lecture

Découvrir le monde, et ses chefs-d’œuvre

Au milieu du siècle dernier à Aix-en-Provence, pour le seul des quatre certificats de la licence de « Lettres modernes » que nous pouvions choisir, j’ai eu la chance d’opter pour celui de Littérature comparée qu’enseignaient Claude Pichois, (au programme, Shakespeare en France,) qui publiera avec Pierre Brunel André et Michel Rousseau le « Que sais-je »  «  Qu’est-ce que la littérature comparée ? et Jacqueline Risset (pour le Pétrarquisme … où nous retrouvions les sonnets de Shakespeare et la naissance du Romantisme). La littérature française était encore un domaine assez clos et lourdement établi sur les langues anciennes supposées sources quasi uniques. Aujourd’hui n’existent plus guère de cloisons entre les travaux de littérature comparée, (dite aussi littérature générale et comparée, approche multidisciplinaire qui consiste en l’étude conjointe ou contrastive des littératures de diverses aires linguistiques et culturelles, impliquant aussi tous les arts,) et ceux sur des textes ou périodes de la littérature française.

Toutes nos cultures doivent à des civilisations anciennes, mais aussi à des cultures voisines plus récentes, et de nos jours me semble-t-il davantage que dans les siècles antérieurs. La circulation des individus, les immigrations désirées et celles parfois massives et forcées sont de plus en plus intenses, enrichissant les savoirs et apportant des variations dans les interprétations : Nous ne voyons pas à la lumière de nos regards les œuvres du Japon comme les japonais, tandis qu’eux voient différemment à travers leurs concepts les œuvres occidentales.

En cette fin d’année Larousse, maison d’édition historiquement spécialisée dans les ouvrages de référence, publie deux ouvrages qui peuvent réjouir ceux qui ont aujourd’hui de la culture une vision plus « comparatistes ». Inutile d’insister sur le sérieux du travail, sur le fond comme sur la forme : « Le nouveau petit Larousse illustré » de 1924 que mon grand-père maternel m’avait prêté fut pendant deux ans, lorsque dans les années quarante j’étais à l’école primaire, mon plus assidu livre de lecture. « Larousse sème à tout vent ». Mais toujours pas n’importe quoi, ni n’importe comment.

Les deux livres, « La découverte du monde par les cartes » et « 500 chefs-d’œuvre à la loupe » suivent l’évolution chronologique et s’ouvrent autant que possible sur le monde entier et la diversité des cultures.

« La découverte du monde par les cartes », des premières expéditions antiques à l’exploration spatiale, s’ouvre sur des cartes contemporaines qui indiquent, selon nos connaissances actuelles, les parcours des humains depuis 1,8 million d’années. Mouvements partant du continent africain, les grandes migrations préhistoriques sont parvenues sur tous les continents depuis plus de 20 000 ans. D’abord direction d’Ouest en Est puis, dans la période historique, des retours invasifs vers l’Ouest. Et aussi, par les mers, les « découvertes » du monde.

La première mappemonde connue, réalisée en 1687 par l’italien Urbano Monte, en rond de 3 mètres de diamètre dessinée à la main sur 60 pages, représente le monde comme un tout, avec le pôle nord au centre. Malgré les déformations des rivages et des échelles approximatives, on y reconnait les dessins des masses continentales. Soyons tout de même étonnés et admiratifs pour les cartes établies dans des temps où les matériaux, outillages et informations, étaient loin de faciliter une vision globale et précise du monde. En 1507 la mappemonde de Waldseemüller, dessine, le « nouveau monde » sous forme d’un continent long et mince, distinct de l’Asie, nommant déjà le nord « Amérique ». Une carte de 1598 montre l’Empire romain (vers 120) les territoires certes déformés mais reconnaissables, avec des rivages approximatifs. La Sicile presque collée à l’Italie frôle la Tunisie, tandis qu’éloignée de l’Italie, la Sardaigne colle quasiment à la Corse.

Philip Parker, dans son Avant-propos, écrit : « Inconsciemment ou à dessein, l’explorateur est porteur de sa propre culture, qu’il exporte partout. Parfois cela a donné naissance à des sociétés hybrides et dynamiques, mais trop souvent mené à des conflits et des destructions de cultures autonomes entières ».

« 500 chefs-d’œuvre à la loupe », suit notre histoire de l’art occidental, mais intercale des œuvres des autres continents.

Une brève présentation situe les œuvres dans leurs contextes culturels, lieu, époque. Plusieurs petits cartels fixent chacun un détail significatif de l’œuvre, qui aide à souligner son originalité. Cet ouvrage ne s’adresse évidemment pas aux professionnels des arts plastiques : il s’agit d’un bon outil pédagogique qui permet un regard sur l’ensemble chronologiques des esthétiques dans leurs divergences, leurs influences réciproques au fil des rencontres et découvertes… En quoi les lecteurs de « La découverte du monde par les cartes » pourront mieux visualiser les échanges entre cultures, et les influences entre civilisations actives ou passées. Pour tout lecteur, à parcourir les temps et les espaces grâce à de bonnes reproductions, une occasion de raviver des souvenirs de lectures – ou d’heureuses visites.

par Marcel ALOCCO

« 500 chefs-d’œuvre à la loupe »,

Larousse (39,95 €)

« La découverte du monde par les cartes »

Larousse, essais et documents, (39,95 €)