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Joan Miro Au-delà de la peinture

La Fondation Maeght propose du 29 Juin au 17 Novembre 2019 un hommage au grand créateur Joan Miro, le fauve catalan selon sa propre expression. Cette exposition est le fruit d’une histoire d’amour, l’amitié est une des formes de l’amour, entre Marguerite et Aimé Maeght, leur ami architecte J.L.Sert et Joan Miro.

Dès le début des années 1960, Miró participe activement au grand projet d’Aimé et de Marguerite Maeght, qui ont établi leur fondation à Saint-Paul-de-Vence. Le couple, inspiré par la visite de l’atelier du peintre à Cala Major, fait appel au même architecte — Josep Lluís Sert — pour la construction du bâtiment et l’aménagement des jardins. Un espace particulier est réservé à Miró.

Photo William Boccara

L’amitié crée une constellation d’œuvres : la fondation Maeght possède 275 œuvres de Miró parmi lesquelles 8 grandes peintures, 160 sculptures, 73 aquarelles, gouaches, et dessins sur papier, une tapisserie monumentale, un important vitrail intégré à l’architecture, 28 céramiques, ainsi que des œuvres monumentales créés spécialement pour le jardin-labyrinthe. Toutes ces créations ont été données à la fondation par Marguerite et Aimé Maeght, ainsi que par Joan Miró, et par la suite, les descendants des familles Maeght et Miró, ainsi que la succession Miró. C’est grâce à leur générosité que s’est ainsi constitué un fabuleux patrimoine, unique en France, un lieu privilégié pour mieux partager les rêves de Joan Miró.

Comment interpréter le titre de l’exposition ?

Il n’y a rien à expliquer à une œuvre qui ne nomme pas ! Miro ne s’attache pas à l’anecdotique mais à l’essentiel.

Elle dit les métamorphoses du vivant en une magie surréaliste qui lie des créatures hybrides de l’œuf de la création aux constellations…Et puis son caractère « enfantin » rend simple le merveilleux. Sa candeur nous ouvre à une dimension poétique… En fait son parcours ne s’est pas arrêté à l’enfance ! Il y a chez Miro un refus d’intellectualiser ses problèmes et il déploie une énergie pour aller à la conquête des pouvoirs perdus de l’enfance. E Morin parlerait de simplexité ! De plus il faut d’abord réaliser le vide en soi pour atteindre ce point infini !

Le rêve avant toute chose… le rêve qui surgit d’un choc !

Photo William Boccara

Je commence mes tableaux sous l’effet d’un choc que je ressens et qui me fait échapper à la réalité. La cause de ce choc peut être un petit fil qui se détache de la toile, une goutte d’eau qui tombe, cette empreinte que laisse mon doigt sur la surface de la table. De toute façon il me faut un point de départ, ne serait-ce qu’un grain de poussière ou un éclat de lumière. […] Je travaille comme un jardinier ou comme un vigneron écrit-il.

Le travail à partir de ce choc initial le métamorphose lui-même. Il sort de sa réalité originelle en gardant sa dimension catalane : Je suis très pessimiste mais par le travail je vais m’évader de ce pessimisme et j’atteins un optimisme. […] Il ne faut pas confondre le tempérament castillan ou andalou avec le tempérament catalan qui est tout à fait opposé. C’est très différent la Catalogne de la tragédie castillane ou andalouse.

Photo William Boccara

Le rêve, la surréalité, le conduisent à fréquenter les surréalistes et sa passion pour l’imprimerie l’amène vers la gravure et la lithographie. Nombreuses sont ses œuvres réalisées pour ses amis poètes, Breton, Tzara, Eluard etc…Cette vibration avec les encres le fascinent comme le précise R.M.Malet commissaire de l’exposition.

Artiste polyvalent il est dans un mouvement perpétuel qui lui fait prendre de la distance avec les courants, les groupes, même les surréalistes. Il garde ce qui est essentiel pour lui : la liberté de fond.

Il va « au-delà de la peinture », de l’objet visuel pour rendre fécond l’imaginaire. Sa création est aussi au-delà de l’abstrait et du figuratif. Sa perception est tendue vers les extrêmes. Il oscille constamment entre les deux infinis pascaliens : l’infiniment petit et l’infiniment grand. Je suis bouleversé quand je vois dans un ciel immense le croissant de la lune ou du soleil. Il y a d’ailleurs dans mes tableaux de toutes petites formes dans des espaces vides. Il est fasciné par ce vide de l’horizon, de l’espace qui induisent un dépouillement impressionnant. Un trait est l’expression de sa réflexion, de son essence.

Cette exposition nous révèle la multiplicité des techniques employées par Miro. Mais comme l’écrivait M Proust l’art n’est pas une question de technique mais de vision.

La vision de Miro vient de ses rêves que la couleur exprime.

La poésie embrasse sa gaieté, son humour, ses oscillations et son sens profond du tragique.

Elle nous emmène au-delà des mots…

Nicole Deleu

Joan Miro

Au-delà de la peinture

29 Juin – 17 Novembre 2019

Fondation Maeght Saint Paul de Vence