Brèves de lecture

Fluxus, à propos de George Maciunas

Et de : « George Maciunas, une révolution furtive » Bertrand Clavez
(éd) Les presses du réel, 2009

Tracer l’itinéraire de G. Maciunas, c’est faire l’histoire du cœur de Fluxus, tant cette vie brève mais intense (1931-1978) a été vouée au désir de réunir dans un « flux » des énergies si diverses, et à une idée humaniste de l’avant-garde artistique comme voie vers une société utopique.

Pourtant, « Ce qui se produisit est unique, des dizaines d’artistes qui œuvraient isolément autour de préoccupations similaires sans parfois se connaître, découvrirent avec Fluxus, non seulement des activités proches des leurs, mais un réseau vaste qui s’étendait d’ores et déjà au-delà de l’Europe… » écrit Bertrand Clavez. Fluxus fut, à travers et grâce à la volonté d’un homme d’y apporter réalisme et clarté classificatrice, un vaste carrefour de diversités. Un laboratoire dans lequel se sont rencontrés et élaborés beaucoup des idées qui influenceront et construiront l’art de cette période. Maciunas, sans l’utopie créatrice duquel Fluxus n’aurait probablement pas existé avec la même force d’expansion, bien que, Pénélope du mouvement, il ait passé son temps à unifier et morceler – je tisse le jour et détisse la nuit – créant unions et conflits aussi féconds les uns que les autres. Grâce au centralisme anarchique de Maciunas, les idées circulent, des artistes s’approchent, se confrontent, réagissent, trouvent à s’exprimer. Dans ses écrits, il « met en évidence la dette que les futurs Fluxus doivent à John Cage, qui les a formés à la pratique de l’aléatoire ». Avec ses diagrammes, il se donne l’illusion d’une cohérence… : « La disparité que l’on attache habituellement à Fluxus ne serait ainsi que superficielle : une grande cohérence rassemblerait ces œuvres », mais Fluxus reste «un nomad’s land ». Autour de ce personnage central d’un moment fort des avant-gardes de la seconde partie du vingtième siècle, Bertrand Clavez, probablement en France le meilleur connaisseur objectif de Fluxus, donne une bonne introduction pour une approche de son histoire. (On sait combien, en ce domaine particulièrement, les témoignages sont… aléatoires !)

En seconde partie, « Mon fils » par Leokadija Maciunas, apporte le récit de cette période par une mère qui accompagna son fils tout au long de sa vie, vivant avec lui les quinze dernières années : Document utile dans sa subjectivité même, comme le sont, de façon plus factuelle, les « Lettres d’informations » et les tracts donnés en annexes, en fin d’ouvrage.

Pour ceux qui voudraient en savoir davantage à propos de Fluxus : voir la revue 20/21.siècles, n°2 automne 2005 spécial « Fluxus en France » coordonné par B. Clavez, (Cahiers du Centre Pierre Francastel). Et aussi « Fluxus dixit, une anthologie vol.I », textes réunis et présentés par Nicolas Feuillie, (Les presses du réel).

par Marcel Alocco